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Le grand atlas de Johannes Blaeu

Partie de page de titre avec des angelots

Commencé dans la deuxième moitié du XVIIe siècle cet Atlas Maior (Grand Atlas) s’inscrit dans la tradition des atlas de géographie du XVIIe siècle hollandais.

Pour en savoir plus

Édition néerlandaise numérisée : Archives régionales de Leyde

Johannes Blaeu

Le grand atlas ou cosmographie Blaviane, en laquelle est exactement descritte la terre, la mer et le ciel

Amsterdam : Blaeu, 1662-1665

12 vol.

[in-folio 546

Le XVIIe, siècle d’or Hollandais

Le XVIIe siècle est le « siècle d’or néerlandais ». Cette période historique des Pays-Bas permet à la République des Provinces Unies (des Pays-Bas) de se hisser au rang de la première puissance commerciale au monde. La liberté de culte est installée aux Pays-Bas ce qui attire les réfugiés opprimés pour leur croyance. Ecrivains et érudits s’y installent et permettent un développement des sciences humaines et des sciences naturelles. Les Pays-Bas deviennent un centre du savoir.

Dès la fin du XVIe siècle, les Pays-Bas sont en situation d’hégémonie dans le commerce de la mer Baltique, bénéficiant de bateaux plus petits et plus rapides que leurs concurrents, les négociants d’Amsterdam sont les plus réactifs de leur époque.

Au XVIIe siècle, ils organisent de nouvelles entreprises commerciales dans le reste du Monde. La Compagnie néerlandaise des Indes Orientales fondée en 1602 joue un rôle essentiel. Elle forge un monopole commercial avec l’Océan Indien et l’Extrême Orient qui durera près de deux siècles.

Cette maîtrise des mers fonctionne de concert avec le développement de la cartographie. Contrairement à ce qu'il se passe dans les autres pays européens, les cartographes et éditeurs mettent en vente librement leur travail et publient de nombreux guides, cartes marines ou atlas, sous réserve de respecter certains secrets de la Compagnie des Indes.

 

Blaeu, une famille d’éditeurs cartographesPortrait de Johannes Blaeu

Parmi ces éditeurs, une famille d’Amsterdam marque ce siècle, la famille Blaeu, père et fils. Le père, Willem Blaeu (1571-1638), est un cartographe qui publie ses premières cartes dès 1605. Il publie des atlas et des globes d'une exactitude remarquable pour l'époque. Willem Blaeu devient dès 1633 le fournisseur des cartes de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales et acquiert une renommée internationale.

Son fils, Johannes Blaeu (1593-1673), cartographe de la Compagnie des Indes et éditeur publie également de nombreuses cartes et globes comme son père. C’est lui qui mènera l’entreprise familiale à son apogée.

Il possède probablement la plus grande imprimerie d’Europe avec 9 presses typographiques pour les textes et 6 presses à taille douce pour les gravures.

Le père et le fils sont en concurrence avec les frères Hondius, Visscher ou Jan Janssonius ce qui les conduira à publier des cartes de plus en plus précises et de plus en plus belles.

Ce sera l’Atlas Maior.

 

L’Atlas Maior

Parmi les productions de la famille Blaeu, un ouvrage se distingue : l’Atlas Maior ou Grand Atlas.

Page de titre de l'Atlas de BlaeuLa création de cet atlas tire son origine de la concurrence acharnée entre deux éditeurs : Janssonius et Blaeu. Depuis plusieurs années, une course à l’atlas comportant le plus de cartes est engagée. Janssonius et Blaeu publient alternativement des atlas comportant soit plus de parties, soit plus de cartes et n’hésitent pas à copier le concurrent. Cette course atteint son apogée avec la publication par Janssonius d’un Atlas Maior comportant plus de 500 cartes, combiné avec l’atlas de Cellarius pour le ciel et un atlas des villes, ce qui en fait une description complète des terres, villes, mers et ciel. La réponse de Blaeu sera son Atlas Maior. L’ambition initiale est comprise dans le titre de l’ouvrage : décrire la Terre, la Mer et le Ciel. Blaeu échouera et publiera uniquement les volumes concernant les pays, les volumes prévus pour la Mer et le Ciel ne verront jamais le jour.

L’édition française, tirée à 400 exemplaires, comporte 12 volumes qui n’a pas son pareil dans les parutions du XVIIe siècle, soit plus de 5300 pages dont plus de 600 cartes. L’ouvrage est également édité en latin, néerlandais et espagnol (l’édition espagnole restera inachevée).

Vendu 450 florins pour l’édition en couleur et 350 florins pour l’édition non coloriée, il est probablement l’ouvrage le plus cher du XVIIe siècle.

L’Atlas Maior est une combinaison de cartes anciennes et nouvelles d’origines très diverses. Certaines cartes ont été utilisées dans d’autres atlas. Ces cartes sont classées dans l’ouvrage par pays ou par continent. Dans chaque volume, en plus des cartes, on trouve les descriptions des territoires représentés.

Les cartes sont réalisées grâce à la technique de la gravure au burin : on creuse à l'aide d'un burin sur la surface d'une plaque de métal, et selon la pression de la main, on détermine la densité de la ligne à imprimer. Johannes Blaeu utilisait le cuivre comme support. Chaque carte était conçue sur une plaque de cuivre différente. Les auteurs et les graveurs des cartes sont rarement mentionnés. On ne relève, par exemple, que 43 signatures de graveurs sur les 600 cartes de l’atlas.

Carte de la Bresse chalonnoiseLes cartes de l’édition conservée à la bibliothèque municipale de Chalon-sur-Saône sont coloriées. Ce travail de mise en couleur était réalisé à la main par des travailleurs à domicile qui coloriaient les cartes sur la base d’un modèle. Ce travail manuel conduit parfois à des différences entre les exemplaires.

Les cartouches présents sur les cartes sont accompagnés de blasons des régions concernées. On y trouve également des illustrations d’allégories et de produits caractéristiques de la région.Carte

L'échelle présente sur chaque carte n'est pas normalisée. Les distances sont mesurées en pouces sur les cartes et en milles sur le terrain. Or au XVIIe siècle, il existe plusieurs dizaines de milles différents. L’Atlas Maior contient donc des barres graduées en dizaine de sortes de milles, décamètres et autres heures de marches.

Même si le nord ne se trouve pas systématiquement en haut de la carte, il est cependant indiqué sur chacune d'elles. L’orientation des cartes peut être modifiée soit pour économiser du papier, soit pour obtenir un plus bel effet. Ainsi, la carte doit toujours être plus large que haute.

 

La fin des éditeurs-libraires Blaeu

L’aventure éditoriale de la famille Blaeu commence à décliner à partir de 1672 lors de l’incendie de l’imprimerie comportant les presses à tailles douces. Les Blaeu perdent alors leurs presses mais aussi les plaques de cuivre gravées nécessaires à l’impression des cartes. Johannes Blaeu décède l’année suivante et ses enfants ne parviendront jamais à rétablir l’entreprise familiale au rang qu’elle tenait au XVIIe siècle.