Les Mille et une nuits est un recueil anonyme qui serait une adaptation en arabe d’un vénérable ouvrage persan dont les éléments constitutifs sont indiens, les Hazâr afsâna ou Mille contes, traduits en arabe sous le titre Mille nuits, vers le VIIIe siècle. Le plus ancien manuscrit connu confirme la présence du texte dans le monde arabe avant le Xe siècle. De nouveaux récits, spécifiquement arabo-islamiques, viennent s’insérer jusqu’au XIIe siècle.
Les manuscrits circulent dans les milieux lettrés mais servent aussi de base aux conteurs qui, selon leur fantaisie, ajoutent ou retranchent des histoires. De nouvelles histoires, autrefois indépendantes, puisées dans le patrimoine indien, arabe, persan, égyptien et même hellénique s’incorporent à l’ensemble. Le texte acquiert une forme à peu près stable vers le XVIIe siècle. Les différents manuscrits ne contenant pas tous les mêmes contes, il n’existe pas un texte établi et définitif qui fasse unanimité.
C’est à partir du schéma narratif d’origine indienne, le récit-cadre, que s’organise l’histoire et que s’agrègent les différents contes. Emboîtant les histoires les unes dans les autres, il permet d’enchaîner à la suite différentes sortes de récits.
Le sultan Shahryar ayant découvert que son épouse l’a trompé, décide de se venger de l’inconstance féminine en exécutant, chaque matin, la femme qu’il aura épousée et avec laquelle il aura passé la nuit. Avec l’aide de sa sœur, Shéhérazade invente un stratagème qui lui sauvera la vie : grâce à ses talents de conteuse, elle relate chaque soir une histoire dont elle ne dévoile pas la fin. Tenu en haleine durant mille et une nuits, le roi finit par la gracier.
Le texte des Mille et une nuits est traduit pour la première fois en français, et adapté, par l’orientaliste Antoine Galland (1646-1715). Celui-ci parle l’arabe, le turc et le persan. Savant et voyageur, il a fait des séjours au Proche-Orient et à Constantinople. Professeur d’arabe au Collège royal et spécialiste de manuscrits, il est l’auteur de plusieurs ouvrages mais il doit sa réputation à sa traduction des Mille et une nuits. Il utilise pour cela un manuscrit du XVe siècle, qu’il traduit en s’adaptant aux goûts de son époque pour en faire un texte plus littéraire se rapprochant du conte de fées, et il s’inspire notamment des écrits de Madame d’Aulnoy. A cette traduction, Galland ajoute des histoires qui lui sont rapportées par un informateur syrien, qu’il écoute et transcrit en en gardant la trame. Ainsi en est-il des célèbres contes Aladin et la lampe merveilleuse ou Ali Baba et les quarante voleurs.
L’ouvrage est publié en douze tomes, de 1704 à 1717, les derniers paraissant à titre posthume. Pendant plus d’un siècle, la version française de Galland représente la seule version des Mille et une nuits en Europe et elle sera beaucoup rééditée (plus de quatre-vingt éditions), contrefaite, et traduite (dans une dizaine de langues). C’est au XIXe siècle que des manuscrits égyptiens plus tardifs deviendront la base des premières éditions arabes qui, elles-mêmes, seront traduites en anglais.
La traduction de Galland est complétée par celle de Jacques Cazotte (1719-1792) et Denis Chavis, parue dans les tomes 38 à 41 du Cabinet de fées (La Suite des Mille et une nuits : Contes arabes) et connue sous le titre Continuation des Mille et une nuits, contes arabes, ou Les Veillées du Sultan Shahryar.
C’est dans le Cabinet des Fées, dont neuf volumes sont consacrés aux Nuits, qu’apparaissent les premières illustrations françaises pour les Mille et une nuits. Elles sont en partie l’œuvre de Marillier. Quant à l’héroïne, Shéhérazade, elle n’est pas représentée une seule fois : elle ne le sera qu’à partir du XIXe siècle.
Avec la vogue littéraire des contes de fées, l’ouvrage jouit d’un succès immédiat en Europe et déclenche un engouement pour l’Orient, qui a pour effet une multiplication de textes qui n’auront d’arabe, persan ou chinois que le qualificatif.
L’orientaliste François Pétis de La Croix (1653-1713) fait paraître de 1710 à 1712, Les Mille et un jours, contes persans. L’ouvrage, dont la forme est celle du récit-cadre, relatant des histoires racontées par sa nourrice, pendant mille et un jours, en référence aux Mille et une nuits, à une princesse du Cachemire, se présente comme la traduction d’un manuscrit persan de récits indiens. On ne retrouva pourtant jamais le texte original : l’ouvrage est ainsi à mi-chemin entre la création littéraire, la traduction, l’adaptation et la supercherie. Les Mille et un jours, qui connaîtront un certain succès avec plusieurs éditions au XVIIIe siècle, ont même été complétés et transformés au XIXe siècle.

Thomas-Simon Gueullette (1683-1766), bibliophile et collectionneur, surtout connu pour la publication des Contes chinois publiés en 1723, est l’auteur, lui aussi, d’ouvrages s’inspirant, par le titre ou la forme, du récit-cadre des Mille et une nuits : Les Mille et un quarts d’heure, contes tartares, parus d’abord en 1715 et réédités en 1753, Les Mille et une heures, contes péruviens, Les Sultanes de Guzarate ou Les Songes des hommes éveillés, contes mongols, parus en 1732.