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L'Instant patrimoine Hors-Série : La conservation des collections patrimoniales

Matériels de conservation

Lorsqu’une bibliothèque conserve des collections patrimoniales, elle se doit de mettre en œuvre les moyens de les préserver au mieux. De nombreuses questions se présentent, notamment en matière de conservation préventive.

Selon la Bibliothèque nationale de France, "la conservation préventive, c’est l’ensemble des actions directes ou indirectes menées en faveur des collections qui ont pour but de prévenir les dégradations et de prolonger la vie des documents".

Les collections patrimoniales peuvent être sujettes à des dégradations dont les causes peuvent relever de trois types de facteurs : le facteur humain, des facteurs externes et des facteurs internes au document.Dos cassé d'un livre ancien

 

Le lecteur, premier ennemi du livre ?

Au chapitre des facteurs humains, ce sont principalement les mauvaises habitudes des usagers qui causent le plus de dégradations. On retrouve ainsi des dos cassés, des coiffes disparues, des tranchefiles manquantes ou encore des coins enfoncés. Ces dégradations font encourir aux documents des risques pour son intégrité. La reliure qui est sensée protéger le livre ne peut plus remplir son office et c’est l’ensemble du document qui risque de disparaitre. Pourtant ce sont les dégradations les plus simples à éviter car il suffit pour y remédier d’avoir de bonnes habitudes pour consulter un livre. On sort le livre de son rayonnage en le saisissant de chaque côté de son dos et non pas en le basculant après l’avoir saisi par la coiffe. On ne force pas la reliure en ouvrant le livre, on ne s’appuie pas sur le document pendant la lecture, etc.

 

Un environnement sain pour une conservation saine !

 

Livre portant d'anciennes moisissures

 

D'autres types de dégradations sont liés à l’environnement. Les collections patrimoniales n’aiment ni les lieux trop humides ni les lieux trop secs. Dans un environnement humide, c’est le risque d’un développement de moisissures. Il suffit d’un taux d’humidité relative de 60% pour que des spores de champignons puissent se réhydrater et se développer. Pour se prémunir de ce type de dégradation, il convient de maintenir un taux d’humidité relative d'environ 50%. Les normes idéales de conservation stipulent une température de 19°C et un taux d’humidité relative de 50-55%, mais l'objectif principal consiste à éviter des variations trop brutales de ces deux paramètres.

Couverture décolorée

 

La lumière présente également un risque pour les documents patrimoniaux car elle agit soit directement sur le document en entraînant la décoloration des documents (photolyse : réaction chimique), soit en combianiason avec d'autres facteurs (oxygène de l'air, humidité, etc).

Ainsi, associée à de mauvaises conditions de conservation, elle peut conduire à d'autres phénomènes : oxydation (jaunissement et acidification), hydrolyse (perte de solidité) ou réticulation du papier (papier rigide et cassant), acidification du cuir affaiblissant la reliure. Conserver les documents dans l'obscurité semble être la solution car les effets de la lumière sont cumulatifs. A la bibliothèque, les documents de Réserve sont conservés dans une pièce éclairée uniquement lors des passages des agents.

Livre à moitié nettoyé

 

Quant à la poussière, qu’elle soit composée de particules biologiquement inertes (sable, ciment, poussières de bois, de fer, etc.) ou de particules potentiellement actives biologiquement (micro-organismes, œufs d’insectes, etc.) elle présente un grand risque pour les collections patrimoniales. C’est pourquoi, les actions de dépoussiérage des collections sont des chantiers qu’il faut continuellement tenir afin de préserver les collections d'une propagation de moisissures ou d’une infestation d’insectes qui seront difficile à endiguer par la suite. De plus, la poussière peut avoir un rôle abrasif sur les matériaux de reliure et participer à leur dégradation.

 

 

Papier casséLes « maladies auto-immunes » du livre

Parfois les matériaux qui constituent le livre deviennent une menace pour lui-même. Ainsi les papiers fabriqués dès le milieu du XIXe siècle sont constitués à partir de pâte à papier à base de bois. Les bois utilisés sont le plus souvent des résineux qui ont naturellement un pH acide. La colle d’encollage du papier utilisée est la colophane (extrait par la distillation de la térébenthine, provenant de la sève de pin). Cette colle est également acide. L’acidité du papier conduit à une dégradation rapide de ce support, il jaunit très rapidement, il devient très fragile et cassant car il perd toute sa souplesse. Il s'agit malheureusement d'un phénomène que l’on ne peut pas complètement endiguer. Il est certain que de mauvaises conditions de conservation accélèrent le processus, il devient alors essentiel de conserver ces documents dans le meilleur environnement possible.

 

Et la restauration ?

Les documents en mauvais état peuvent parfois faire l’objet d'une restauration mais la restauration n’est jamais anodine. Elle suscite toujours beaucoup de questions et de débats. Faut-il restaurer ? Comment restaurer ? Comment respecter l'histoire du document ? Refaire à l’identique ? On va parfois préférer stabiliser un document dans son état plutôt que de le restaurer complètement.

Dans tous les cas, débuter un chantier de restauration ne peut se faire sans l’aval du Comité technique de restauration du patrimoine des bibliothèques publiques (CTR) constitué de spécialistes du livre ancien et qui émet un avis sur la pertinence d’une restauration. Ce comité permet de garantir une certaine homogénéité dans la restauration au plan national et de veiller à ce que les interventions sur les documents soient bien réversibles.